Qu’est-ce que la MDMA ?
Que ce soit par intérêt pour les thérapies alternatives ou par les médias, nous avons tous déjà entendu parler de la MDMA ou de son nom d’usage, l’ecstasy, ou Molly.
C’est, en fait, une molécule de synthèse (Méthylènedioxyméthamphétamine) qui appartient à la famille des amphétamines. Elle fait l’objet de plusieurs recherches scientifiques récentes. En effet, on a découvert qu’elle pourrait être bien plus bénéfique que prévu avec la thérapie assistée par MDMA.
Néanmoins, son statut très particulier rend la MDMA et la thérapie assistée illégales dans de nombreux pays.
Faire la fête ou perdre du poids ?
Si elle est aujourd’hui utilisée sous le nom d’ecstasy à des fins récréatives, cette substance a d’abord été créée par un laboratoire médical qui espérait la commercialiser en tant que coupe-faim. Sa vocation première était donc d’aider à perdre du poids. Seulement, elle semble un peu trop stimulante pour être lancée à grande échelle.
Finalement, la MDMA n’est pas mise sur le marché comme cure d’amaigrissement. Cependant, ses effets stimulants sont étudiés brièvement par l’armée américaine, sans suite.
On la retrouve dans les années 80, vendue illégalement comme une substance festive ayant la réputation de prolonger la fête jusqu’au bout de la nuit. Mais ce sont désormais ses effets psychoactifs qui intéressent les chercheurs du monde médical.
Comment fonctionne la thérapie assistée par MDMA ?
Depuis 20 ans, plusieurs études montrent une influence positive de la MDMA sur le syndrome de stress post-traumatique. C’est d’autant plus vrai lorsqu’elle est utilisée en combinaison avec des thérapies d’accompagnement psychologique. Pour cette raison, plusieurs thérapeutes pionniers des psychédéliques ont créé cette nouvelle discipline, baptisée thérapie assistée par MDMA.
Un trip en pleine conscience
Contrairement aux truffes de psilocybine ou à l’Ayahuasca, la MDMA n’est pas considérée comme un psychédélique. Elle ne procure pas d’hallucination ou de voyage dans un univers imaginaire hors du commun. En simplifiant, on pourrait dire qu’elle agit essentiellement sur l’amour et la peur, du moins dans un cadre thérapeutique. L’utilisation festive de l’ecstasy est, en effet, très différente.
Le début de la thérapie
Les thérapies assistées par MDMA se déroulent sous la forme de plusieurs séances intimistes et relaxantes.
Le patient est assis ou allongé sous la surveillance d’un ou deux professionnels et prend la dose prescrite. À mesure que les effets montent, le participant est invité à revisiter ses traumatismes. Si cette étape est douloureuse au début, la substance va progressivement réduire la réponse au stress de l’amygdale. Cette action neurochimique désactive les réflexes liés à la peur et offre une nouvelle perspective pour aborder les causes du Syndrome de Stress Post-Traumatique.
La MDMA et la peur
Cette atténuation de la peur permet donc de se confronter aux traumatismes sous un nouvel angle. La reconfiguration du système nerveux induite par la MDMA donne un certain contrôle sur les émotions négatives. À partir de là, la personne est capable de les traverser, de les décrire et de les analyser avec sérénité.
Dans ce processus, on peut intégrer les traumatismes comme des expériences plutôt que de les subir comme des menaces. C’est là tout l’enjeu de ce traitement puisque la notion de menace permanente est justement caractéristique du Syndrome de Stress Post-Traumatique.
Ainsi, les personnes qui souffrent de ce trouble psychiatrique pourraient déprogrammer leur réflexe d’anxiété. À partir de là, ils accèderont à une phase de résilience.
Un amour inconditionnel
On l’a évoqué, lors d’une thérapie assistée, la MDMA stimule le cerveau d’une façon unique. Elle permet la libération de plusieurs neurotransmetteurs, comme la sérotonine, la dopamine et l’ocytocine. Cette stimulation provoque une bouffée d’amour et d’empathie envers les autres. À ce titre, la MDMA est qualifiée de molécule empathogène qui peut augmenter la confiance en l’autre, y compris dans le thérapeute en charge du patient.
De plus, elle diminue les sentiments de culpabilité, d’auto-dénigrement et les ruminations. C’est justement un pas important vers le bien-être : cesser de chercher des responsables, en particulier soi-même et retrouver un lien de plaisir avec le quotidien.
Une approche psychothérapeutique du SSPT
Les thérapies assistées s’inscrivent dans le cadre d’une psychothérapie étalée sur plusieurs semaines. La thérapie alterne entre des ingestions supervisées de MDMA et des sessions de discussions avec un thérapeute ou un psychiatre.
Ce protocole permet d’exploiter le potentiel de la MDMA. Avec une diminution de la peur et une augmentation de la compassion, l’esprit du patient est plus facile à faire évoluer. La thérapie bénéficie donc d’un tremplin émotionnel, d’un état d’esprit complètement ouvert et dépourvu de blocages. Dans ce contexte, la MDMA peut être vue comme un accélérateur de thérapie.
Les entretiens avec le professionnel de santé sont donc un moyen de travailler les traumatismes. Ils ne les effacent pas mais les rendent tolérables. Pour de nombreuses personnes ayant suivi une thérapie assistée par MDMA, il y a vraiment un changement.
Faire une thérapie assistée par MDMA légalement
Comme la substance est interdite dans la plupart des pays, il est aujourd’hui difficile de trouver un thérapeute proposant un accompagnement à base de MDMA.
Néanmoins, les lignes bougent un peu et, après des décennies sans nouvelle découvertes, des recherches sur le sujet de la santé mentale émergent depuis les années 2010.
La psychothérapie assistée par MDMA est légale en Australie depuis 2023. Aux États-Unis, la MAPS Public Benefit Corporation a fait une demande d’exploitation à la Food and Drug Administration (FDA) qui devrait donner son verdict en 2024 ou 2025. Au Canada, les médecins peuvent demander un accès exceptionnel à la MDMA pour les traitements d’urgence.
Légalité de la thérapie MDMA en Europe
En Europe, l’utilisation de substances réglementées à des fins thérapeutiques est très limitée. À l’heure actuelle, aucun pays du Vieux Continent n’autorise les thérapies assistées par psychédéliques. Seuls les Pays-Bas proposent des retraites à psilocybine légales. Elle n’est donc pas légale en France, en Suisse ou en Belgique.
Les effets de la MDMA
Au niveau cérébral, la MDMA va augmenter la libération de plusieurs neurotransmetteurs. Pour les neurones, c’est un vrai feu d’artifice chimique qui va exacerber plusieurs fonctions émotionnelles, sensorielles et mnésiques. À court terme, l’affluence des neurotransmetteurs met le consommateur dans un état de grande disponibilité émotionnelle, d’ouverture à soi et aux autres et de forte empathie.
La MDMA produit ses effets environ 45 minutes après la prise et pendant 3 à 6 heures. En tant qu’amphétamine, elle procure une désinhibition et une forte sensation d’énergie. Les utilisateurs évoquent une plus grande facilité à aller vers l’autre, à s’ouvrir et à partager, ainsi qu’un sentiment de bonheur intense ou de paix intérieure. La substance favorise les émotions vives, à la fois internes (souvenirs, subconscient), et en relation avec les stimulations extérieures (musique, danse, désir). Ce sont ces réactions hors du commun qui sont évaluées dans le cadre d’une potentielle utilisation thérapeutique.
Les effets secondaires de la MDMA
Néanmoins, cette molécule provoque aussi des effets indésirables voire dangereux. La montée en puissance entraîne parfois une activité cardiovasculaire importante : augmentation de la tension artérielle ou trouble de rythme cardiaque. De ce fait, elle est déconseillée en cas de problèmes cardiovasculaires.
De même, selon les doses et la réceptivité du consommateur, on retrouve des crampes, une désorientation, des vertiges ou une contraction involontaire de la mâchoire.
La désinhibition et l’impression d’avoir une énergie inépuisable peuvent aussi engendrer des comportements à risque pour soi ou pour les autres. C’est pourquoi la prise de MDMA ne doit s’envisager que sous le contrôle d’une personne de confiance et dans un environnement adapté.
Qu’est-ce que le syndrome de stress post-traumatique ?
Au même titre que les chercheurs étudient la psilocybine pour ses effets sur la dépression, plusieurs études s’intéressent à l’effet de la MDMA sur le SSPT.
Dans le syndrome de stress post-traumatique, le patient doit faire face à des angoisses et des souffrances issues d’événements traumatisants (maltraitance, guerre, viol, décès brutal dans l’entourage, licenciement, adultère, accident de la route, harcèlement et bien d’autres).
D’un point de vue cognitif, les traces de ces événements sont trop fortes pour que le cerveau puisse les traiter normalement et les classer. Le traumatisme reste vivace, permanent et empêche un fonctionnement normal. Le système nerveux reste stressé par un état de vigilance constante. Il n’arrive plus à s’adapter et s’épuise.
Les personnes touchées par un SSPT peuvent ressentir un ou plusieurs phénomènes liés aux souvenirs traumatiques.
La reviviscence
L’une des caractéristiques majeures de ce trouble est la reviviscence. Ce phénomène fait parfois subitement revivre la scène traumatisante sous forme de flashbacks conscients ou inconscients. On identifie des réflexes de peur (sursaut, surréaction), d’intrusions involontaires d’images ou de pensées ou encore de cauchemars récurrents.
L’évitement
L’évitement est au contraire un blocage de l’esprit. Son but est d’éviter de traiter toute information liée à l’événement traumatisant. Dans ce cas, on recense un refus de se confronter aux personnes, aux conversations, aux idées associées au traumatisme.
Les troubles de l’humeur et de la cognition
Le SSPT empêche les personnes qui en souffrent de profiter du quotidien. Il les maintient dans un état de grande vulnérabilité pouvant aller de l’hypersensibilité à la dépression en passant par l’irritabilité, les troubles de l’attention ou les addictions.
La recherche sur la MDMA
Les effets de la thérapie par MDMA sur le SSPT
D’après les recherches récentes, la MDMA pourrait rééquilibrer les souvenirs trop fort et permettre la confrontation au souvenir. En diminuant le réflexe de peur, la molécule offrirait ainsi la possibilité de lever les défenses psychologiques et l’opportunité de traiter les sources du problème.
Des résultats prometteurs
En 2023, l’Université de Californie à San Francisco a publié une étude sur les effets de la MDMA dans le traitement du Syndrome de Stress Post-Traumatique. Les chercheurs en ont donné une dose avant une séance de psychothérapie focalisée sur le traumatisme. Ils ont répété ce protocole pour un total de 3 séances étalées sur 12 semaines.
Finalement, 86,5% des patients ayant reçu de la MDMA ont présenté une amélioration de leurs symptômes. Mieux, 71,2% d’entre eux ne présentaient plus les critères de diagnostic du SSPT. Dans le groupe contrôle sous placebo, le résultat était de 47,6%.
Un an après, les participants de l’étude témoignaient encore des bénéfices à long terme suite au protocole. Voilà qui est encourageant pour la suite et qui devrait donner lieu à de nombreux débats !
FAQ sur la MDMA
La thérapie pas MDMA n’est pas dangereuse dans le cadre d’un suivi psychologique. En revanche, il est peut être dangereux de :
– Prendre des doses élevées. Il est possible de subir des effets indésirables gênants dès 1,5-2 mg/kg;
– Consommer sans supervision;
– Combiner la MDMA avec des antidépresseurs de type ISRS ou des neuroleptiques;
– Prendre la molécule si l’on souffre d’hypertension artérielle ou d’insuffisance cardiaque ou rénale
Les traitements médicamenteux à base d’antidépresseurs ou de neuroleptiques sont efficaces pour 25 à 30% des patients souffrant de SSPT. Ce qui est faible. La MDMA pourrait avoir une efficacité supérieure. Pour le moment, elle se présente comme l’option la plus efficace mais il est trop tôt pour affirmer qu’elle soigne le SSPT.
À l’heure actuelle, seule l’Australie a légalisé la thérapie assistée. Les États-Unis pourraient très prochainement faire évoluer leur législation. En revanche, l’Europe ne semble pas bouger sur cette question.
On ne trouve pas de retraites légales autour de la consommation de MDMA. Seule la psilocybine offre ce type de séjour.
Ces trois termes désignent la même molécule, mais dans différents contextes. MDMA caractérise la molécule et son usage thérapeutique. Ecstasy et Molly sont empruntés au vocabulaire de l’usage récréatif, à l’origine cantonné aux rave party.
À dose modérée et sans contre-indication médicale, la MDMA n’est pas mortelle. Toutefois, en médecine, on évalue à quel dosage une substance peut entraîner la mort. Pour celle-ci, la dose létale médiane chez l’humain est estimée à 10–20 mg/kg.
Néanmoins, il s’agit d’une dose moyenne et il faut considérer que, pour une minorité de personnes, l’ecstasy peut devenir mortelle à une dose inférieure. Ces considérations plaident en faveur d’un accompagnement professionnel pour les néophytes.
Crédits photo Image de Drazen Zigic sur Freepik
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