19 décembre 2024 Lecture : 5 mins

Peut-on venir à bout du bégaiement ? Si vous avez vu le film Le Discours d’un Roi, vous savez que oui. On y voit George VI, roi d’Angleterre, se battre contre ce trouble de l’élocution. Et parvenir à le surmonter avant son accession au trône. D’ailleurs, plusieurs célébrités ont réussi cette prouesse. Bruce Willis, Joe Biden, Marilyn Monroe ou Julia Roberts ont tous souffert et guéri de leur bégaiement. Et s’il existe déjà plusieurs méthodes thérapeutiques, les champignons à psilocybine montrent aussi des résultats encourageants. Et même si on n’est pas roi !

Quel lien entre champignon et bégaiement ?

Les champignons magiques questionnent la recherche scientifique. Ils se révèlent peu à peu comme des outils thérapeutiques prometteurs. Et leurs applications évoluent constamment.

Il y a 10 ans, on parlait de leur potentiel dans le traitement de la dépression. Puis de l’alcoolisme. Aujourd’hui, les études scientifiques s’intéressent à l’anorexie, au diabète et aux troubles du désir sexuels.

Mais les molécules psychédéliques n’ont pas encore révélé tous leurs secrets. Des scientifiques commencent à étudier leur effet sur le bégaiement. D’après une première hypothèse, les substances psychédéliques pourraient ainsi apporter un soulagement aux personnes qui en souffrent.

C’est important, car ce trouble de la fluidité de la parole touche environ 600 000 individus en France.

Est-ce que la psilocybine soigne le bégaiement ?

C’est difficile à affirmer. Mais il y a des témoignages qui vont dans ce sens. Chaque voyage psychédélique est différent. Et il en va de même pour les effets. Dans certains cas, la prise de champignons hallucinogènes ou de truffes magiques peut apporter des améliorations sur :

  • la capacité d’élocution ;
  • l’anxiété lié à la prise de parole en public ;
  • l’acceptation du bégaiement ;
  • la peur de bégayer.

Une expérience qui fait rêver

Paul Stamets est une figure emblématique de la mycologie et du microdosage de psilocybine. Dans sa jeunesse, il souffrait d’un bégaiement prononcé. Comme beaucoup, ce trouble entravait sa confiance en lui et ses interactions sociales.

Jeune adulte, il décide d’expérimenter pour la première fois les effets des champignons psychédéliques. Mais sans intention thérapeutique précise, sans se douter que cela pourrait influencer son bégaiement.

Stamets est alors en pleine nature pour observer un orage qui se déploie à l’horizon.

En état de conscience modifiée, il entreprend spontanément un exercice de répétition mentale, comme un mantra. Il répète une affirmation qu’il espère libératrice : “Je ne bégayerai plus“. Ce moment semble marquer un tournant dans sa vie.

Un bégaiement atténué

Selon Paul Stamets, cette expérience unique a entraîné une diminution notable de son bégaiement, presque jusqu’à sa disparition. Il raconte avoir mis à profit cette “guérison miraculeuse” tout de suite en faisant ce que la plupart des jeunes garçons feraient sans doute : aller parler à des filles !

D’après lui, ce changement ressemble à une sorte de “réinitialisation” des circuits cérébraux. La psilocybine aurait pu améliorer sa plasticité cérébrale permettant au cerveau de construire de nouveaux chemins. La recherche n’est pas encore assez avancée pour confirmer cette hypothèse.

Découvrez son témoignage (en anglais)

Une étude américaine

L’histoire du traitement du bégaiement par la psilocybine commence à l’Université de New York. Des chercheurs de la Steinhardt School of Culture, Education, and Human Development ont publié une étude dans une revue spécialisée, le Journal of Fluency Disorders.

Ils y expliquent avoir eu vent de plusieurs publications sur les effets positifs des psychédéliques. Ces célèbres études concernaient des pathologies liées à l’anxiété ou aux troubles du stress post-traumatique (SSPT).

Et d’après eux, ces pathologies “partagent certains symptômes avec le bégaiement. [… ] Donc, ces substances pourraient représenter une piste intéressante pour en réduire les symptômes”.

Plongée dans les récits d’internautes

Pour mener à bien leurs travaux, les scientifiques ont exploré un terrain inattendu : le forum en ligne Reddit, réputé pour ses communautés diverses et engagées. Entre 2012 et 2022, ils ont collecté et analysé les messages publiés par 104 utilisateurs distincts.

Tous ces posts comportaient des mots-clés associés à la parole, au bégaiement et aux psychédéliques. Pour rester précise dans son enquête, l’équipe a exclu plusieurs mots clés. Elle a donc mis de côté toutes les autres substances, comme l’ecstasy ou l’ayahuasca.

Les chercheurs ont ensuite classé ces contributions dans cinq grandes catégories selon les effets rapportés :

  1. Comportement : modification des habitudes de vie ;
  2. Émotions : régulation de l’humeur ou états altérés ;
  3. Cognition : flexibilité mentale et introspection ;
  4. Croyances : évolutions des perspectives spirituelles ou philosophiques ;
  5. Sociabilité : sentiment de connexion et d’empathie envers autrui.

Un bilan globalement positif

L’analyse de ces résultats révèle une tendance encourageante :

  •  74 % des témoignages évoquent des effets positifs après la prise de psychédéliques. Cela concerne en particulier le comportement et les émotions.
  • Parmi eux, près de la moitié ont indiqué une amélioration significative de leur fluidité de parole. L’un d’entre eux dit que “la psilocybine a été un facteur clé pour non seulement améliorer ma manière de parler. Mais aussi pour mieux comprendre qui je suis et redéfinir mon regard sur la vie“.
  • En revanche, 10 % des récits font état d’expériences négatives. Ils relatent des effets secondaires désagréables, de l’anxiété ou des troubles temporaires de la perception.

Synthèse de l’étude sur l’effet de la psilocybine contre le bégaiement

EffetsProportion
Positifs74 %
Neutres11,6 %
Mixtes (positifs et négatifs)4,8 %
Négatifs9;6%

L’importance du cadre

À ce stade, une chose est frappante. Les personnes ayant essayé la psilocybine pour soigner leur bégaiement l’ont fait sans encadrement. Livrés à eux-mêmes, sans psychiatre ni facilitateur. On sait pourtant que la préparation et l’intégration d’une expérience psychédélique jouent pour beaucoup dans le résultat.

Le set and setting, incluant la mise en confiance, des discussions préalables et la sensation d’un voyage intérieur sûr et maîtrisé permettent de limiter les sensations d’inconfort.

C’est justement l’intérêt de la retraite psychédélique ou de la thérapie assistée. Elles proposent une guidance professionnelle qui sécurise le trip pour en tirer des effets positifs.


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Prudence et méthode

Ces perspectives prometteuses n’empêchent pas une certaine prudence. Les données sont limitées et on ne sait pas comment les substances ont été prises. Il y a la question du cadre mais aussi de la dose, des contre-indications médicales et de nombreux autres facteurs.

D’après les chercheurs, les “résultats suggèrent toutefois que les psychédéliques pourraient avoir un rôle à jouer dans la prise en charge du bégaiement, ce qui justifie des recherches plus approfondies”.

Dans un futur proche, ces scientifiques prévoient de lancer des essais cliniques rigoureux et randomisés. Leur protocole intégrera un encadrement par des professionnels de santé. Leur démarche est essentielle pour transformer ces promesses en solutions tangibles.

Bégaiement et activité cérébrale

La piste de la motricité de la parole

On ne sait pas tout du bégaiement. Mais la recherche en médecine a déjà identifié quelques processus fondamentaux.

Chez les personnes souffrant de bégaiement, le cerveau présente des anomalies de connectivité et d’activité. Cela concerne notamment les aires liées à la motricité de la parole. Ces zones, qui gèrent les mouvements des cordes vocales, de la langue ou des muscles de la bouche, semblent moins irriguées par le sang. 

La piste du mode par défaut

D’autres travaux montrent des déséquilibres dans les processus cérébraux du réseau du mode par défaut (DMN). C’est une fonction cognitive très intéressante puisqu’elle est impliquée dans les processus cognitifs internes. On le retrouve à l’œuvre pour des tâches comme la rêverie, la réflexion sur soi-même ou les souvenirs autobiographiques. Tout ce qui ne nécessite pas d’avoir conscience de ce qu’on fait.

Le DMN est le fil conducteur de nos automatismes. Mais s’il est perturbé, il vient complexifier nos processus mentaux, influençant l’équilibre entre réflexion, action et émotion.

Ce déséquilibre peut exacerber l’anxiété sociale, un facteur clé du maintien et de l’aggravation du bégaiement. On suppose que les champignons magiques pourraient réduire l’hyperactivité du DMN. Et donc limiter ses effets liés à la rumination dans l’anxiété sociale et la dépression.

Il reste beaucoup à découvrir, mais les psychédéliques promettent d’ouvrir de nombreuses voies de réflexion.


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